FODIB ET SON MEMORANDUM QUI VIENT APPUYER LE PROCESSUS ELECTORAL
Burundi Information (le 15 mai 2020). Les vieilles habitudes s’en vont difficilement ou Iyakavukanye irakabaganwa comme on dit dans la langue de Ntahokaja. Dans le cas présent, l'adage concerne quelques Burundais de la diaspora qui viennent de récidiver en apportant indirectement un appui fort désiré à un régime en fin de mandat. Du déjà vu donc dans l’histoire récente du Burundi. À quelques exceptions près.[1]
La récidive est signée FODIB ou Forum des Diasporas burundaises, une poignée d’organisations concentrées dans une zone tout aussi limitée. Localisées en Europe occidentale, ces dernières ont en commun le fait d’avoir comme principaux dirigeants des individus ayant servi de près ou de loin, l’organisation terroriste et génocidaire au pouvoir. Cela est d’ailleurs confirmé par le contenu du document qu’ils ont rendu public le 10 mai.
Le FODIB ou Forum des Diasporas burundaises vient d'adresser un mémorandum aux candidats à l’élection présidentielle prévue au Burundi le 20 mai 2020. Prétendant parler au nom de toute la diaspora, les auteurs se cherchent en réalité une façon de rendre publique leur approbation de la campagne électorale qui s’achève bientôt, l’organisation du scrutin et, en filigrane, le régime en place qui a tout orchestré. Pour le reste, il est facile de deviner l'objectif ultime de cette gymnastique.
Le document rendu public par le FODIB porte la signature d’un ancien officier subalterne de l’armée burundaise ayant presté comme aide de camps de l’ancien dirigeant de l’organisation terroriste génocidaire FRODEBU devenu Président de la République du Burundi en 1993. Une petite recherche sur la toile montre que dans le temps, celui-ci était identifié comme officier tutsi mais qu’il n’aurait aucun problème aujourd’hui à se passer de cette identité. Ce n’est pas cela le seul problème. La vraie question est au niveau de la teneur du mémorandum qu’il a signé en date du 10 mai 2020. Et il serait tout aussi intéressant d’enquêter sur la procédure ayant abouti à la production de ce document mal venu – ceci fera l’objet d’un autre numéro à part.
Le mémorandum du FODIB s’articule autour de 4 points, à savoir, l’assainissement de la vie politique et respect des droits de l’homme, la bonne gouvernance, la sécurité, et enfin, le développement socio-économique. En lisant le document, on remarque qu’il est muet sur les graves violations des droits humains qui ont caractérisé le Burundi depuis l’avènement du régime CNDD-FDD, y compris ceux commis depuis 2015. Son unique recommandation y relative est celle qui demande aux candidats de « Assurer la sécurité de tous les citoyens sans aucune distinction d’ethnie, de religion, de région, de partis politiques ou de clans ».
Le mémorandum du FODIB ne touche pas aux crimes d’État commis dans le domaine économique et qui restent toujours impunis, notamment la vente illicite de l’avion présidentiel en 2006, l’importation de Malaisie par la police Burundaise en 2009, d’armes destinées aux miliciens génocidaires du FDLR, etc.). Là aussi, le mémorandum se contente de recommander d’ « Améliorer le climat des affaires dans le pays ». C’est comme si la base actuelle est bonne puisqu’on ne peut « améliorer » que ce qui est déjà bon!
Le moins que l’on puisse dire, c’est que, venant de quelqu’un qui n’a aucune responsabilité dans les graves crimes qui se commettent quasi quotidiennement au Burundi, le document est trop neutre. Ça pourrait même amener certains à croire que la direction du FODIB a peur des réseaux mafieux déjà identifiés responsables de ces crimes. Les moins conservateurs quant à eux iraient jusqu’à penser qu’il est impossible qu’il n’y ait pas dans la direction du FODIB des individus qui ont gardé des liens étroits avec les auteurs des atrocités. Tout ceci reste bien sûr au niveau de l’imagination, ce qui n’ôte cependant en rien la mollesse du mémorandum eu égard aux crimes graves qui restent toujours impunis. Encore une fois, pour éviter que l’opinion incrimine globalement alors qu’y a probablement des innocents dans l’équipe, la meilleure formule reste celle d’interroger les concernés.
D’autre part, il est permis de douter de la représentativité des soi-disant signataires, ce qui constitue une raison de plus de contacter les concernés pour vérification. S’il s’avérait que la procédure a été menée démocratique de la base des quelques organisations mentionnée au sommet de la direction du FODIB, nous ne pourrons que saluer ne serait-ce que la démarche empruntée --sans jamais oublier le tort global causé par la finalité de l’opération. En effet, considérant que le FODIB est perçu par une certaine opinion comme étant de l’opposition [ce qui reste à confirmer ou à infirmer], par son mémorandum aux candidats, il légitimerait un processus initié par un régime qu’il est censé combattre. S’il était innovateur, il proposerait autre chose que le changement dans la continuité de ce système en place et qui tue depuis 2005 que l’actuel Président du FODIB a contribué à mettre en place.
Enfin, un mot sur la réception réservée au mémorandum dans la presse. Par lassitude ou pour cause de simple légèreté, il y en a qui n’ont fait que saluer cette sortie médiatique. Ce rôle est normalement dévolu aux organes de presse des différents ministères qui, dans la foulée, ne manquent pas d’étaler leurs limites.[2] Parmi les médias qui ont relayé le mémorandum du FODIB, certains sont gérés par de vrais opposants au régime et au processus électoral en cours. Néanmoins, on dirait que les quelques années d’expérience qu’ils comptent dans le domaine de la communication ne leur ont rien appris. Nous leur rappellerons simplement que tout journaliste soi-disant indépendant qui se contente de relayer des communiqués d’un gouvernement [ou de ses acolytes] sans en faire une analyse, n’est qu’un simple courtier.
En résumé, le contenu et le timing du mémorandum du FODIB ne causent plus de problèmes. Il reste deux questions. D’abord, celle de la représentativité douteuse des auteurs. On se doit encore de trouver s’ils étaient mus par leurs propres intérêts et/ou par leur allégeance au régime criminel en place au Burundi. L’autre question est l’impact direct du mémorandum, ce coup de pouce indu à un régime. Même si certains analystes venaient à minimiser le document comme n’ayant aucune portée sur le processus électoral en cours, la vérité est que dans l’immédiat, il prête des airs de respectabilité aux candidats qui, dans leur totalité, ne diffèrent pas tant de celui qui représente le CNDD-FDD. En effet, même s’ils ne le reconnaissent pas officiellement dans leur campagne, tous doivent tout à l’organisation qu’ils font semblant de défier. Ce qui confirme pour la nième fois qu’on est à la veille d’une compétition qui n’en est pas une. (BINFO)
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[1] http://www.burundi-information.net/des-burundais-de-la-diaspora-decus-par-le-regime-cndd-fdd-ecrivent-a-pierre-nkurunziza.html
[2] http://www.burundi-information.net/burundi-diplomatie-aux-origines-du-consulat-d-australie.html
La récidive est signée FODIB ou Forum des Diasporas burundaises, une poignée d’organisations concentrées dans une zone tout aussi limitée. Localisées en Europe occidentale, ces dernières ont en commun le fait d’avoir comme principaux dirigeants des individus ayant servi de près ou de loin, l’organisation terroriste et génocidaire au pouvoir. Cela est d’ailleurs confirmé par le contenu du document qu’ils ont rendu public le 10 mai.
Le FODIB ou Forum des Diasporas burundaises vient d'adresser un mémorandum aux candidats à l’élection présidentielle prévue au Burundi le 20 mai 2020. Prétendant parler au nom de toute la diaspora, les auteurs se cherchent en réalité une façon de rendre publique leur approbation de la campagne électorale qui s’achève bientôt, l’organisation du scrutin et, en filigrane, le régime en place qui a tout orchestré. Pour le reste, il est facile de deviner l'objectif ultime de cette gymnastique.
Le document rendu public par le FODIB porte la signature d’un ancien officier subalterne de l’armée burundaise ayant presté comme aide de camps de l’ancien dirigeant de l’organisation terroriste génocidaire FRODEBU devenu Président de la République du Burundi en 1993. Une petite recherche sur la toile montre que dans le temps, celui-ci était identifié comme officier tutsi mais qu’il n’aurait aucun problème aujourd’hui à se passer de cette identité. Ce n’est pas cela le seul problème. La vraie question est au niveau de la teneur du mémorandum qu’il a signé en date du 10 mai 2020. Et il serait tout aussi intéressant d’enquêter sur la procédure ayant abouti à la production de ce document mal venu – ceci fera l’objet d’un autre numéro à part.
Le mémorandum du FODIB s’articule autour de 4 points, à savoir, l’assainissement de la vie politique et respect des droits de l’homme, la bonne gouvernance, la sécurité, et enfin, le développement socio-économique. En lisant le document, on remarque qu’il est muet sur les graves violations des droits humains qui ont caractérisé le Burundi depuis l’avènement du régime CNDD-FDD, y compris ceux commis depuis 2015. Son unique recommandation y relative est celle qui demande aux candidats de « Assurer la sécurité de tous les citoyens sans aucune distinction d’ethnie, de religion, de région, de partis politiques ou de clans ».
Le mémorandum du FODIB ne touche pas aux crimes d’État commis dans le domaine économique et qui restent toujours impunis, notamment la vente illicite de l’avion présidentiel en 2006, l’importation de Malaisie par la police Burundaise en 2009, d’armes destinées aux miliciens génocidaires du FDLR, etc.). Là aussi, le mémorandum se contente de recommander d’ « Améliorer le climat des affaires dans le pays ». C’est comme si la base actuelle est bonne puisqu’on ne peut « améliorer » que ce qui est déjà bon!
Le moins que l’on puisse dire, c’est que, venant de quelqu’un qui n’a aucune responsabilité dans les graves crimes qui se commettent quasi quotidiennement au Burundi, le document est trop neutre. Ça pourrait même amener certains à croire que la direction du FODIB a peur des réseaux mafieux déjà identifiés responsables de ces crimes. Les moins conservateurs quant à eux iraient jusqu’à penser qu’il est impossible qu’il n’y ait pas dans la direction du FODIB des individus qui ont gardé des liens étroits avec les auteurs des atrocités. Tout ceci reste bien sûr au niveau de l’imagination, ce qui n’ôte cependant en rien la mollesse du mémorandum eu égard aux crimes graves qui restent toujours impunis. Encore une fois, pour éviter que l’opinion incrimine globalement alors qu’y a probablement des innocents dans l’équipe, la meilleure formule reste celle d’interroger les concernés.
D’autre part, il est permis de douter de la représentativité des soi-disant signataires, ce qui constitue une raison de plus de contacter les concernés pour vérification. S’il s’avérait que la procédure a été menée démocratique de la base des quelques organisations mentionnée au sommet de la direction du FODIB, nous ne pourrons que saluer ne serait-ce que la démarche empruntée --sans jamais oublier le tort global causé par la finalité de l’opération. En effet, considérant que le FODIB est perçu par une certaine opinion comme étant de l’opposition [ce qui reste à confirmer ou à infirmer], par son mémorandum aux candidats, il légitimerait un processus initié par un régime qu’il est censé combattre. S’il était innovateur, il proposerait autre chose que le changement dans la continuité de ce système en place et qui tue depuis 2005 que l’actuel Président du FODIB a contribué à mettre en place.
Enfin, un mot sur la réception réservée au mémorandum dans la presse. Par lassitude ou pour cause de simple légèreté, il y en a qui n’ont fait que saluer cette sortie médiatique. Ce rôle est normalement dévolu aux organes de presse des différents ministères qui, dans la foulée, ne manquent pas d’étaler leurs limites.[2] Parmi les médias qui ont relayé le mémorandum du FODIB, certains sont gérés par de vrais opposants au régime et au processus électoral en cours. Néanmoins, on dirait que les quelques années d’expérience qu’ils comptent dans le domaine de la communication ne leur ont rien appris. Nous leur rappellerons simplement que tout journaliste soi-disant indépendant qui se contente de relayer des communiqués d’un gouvernement [ou de ses acolytes] sans en faire une analyse, n’est qu’un simple courtier.
En résumé, le contenu et le timing du mémorandum du FODIB ne causent plus de problèmes. Il reste deux questions. D’abord, celle de la représentativité douteuse des auteurs. On se doit encore de trouver s’ils étaient mus par leurs propres intérêts et/ou par leur allégeance au régime criminel en place au Burundi. L’autre question est l’impact direct du mémorandum, ce coup de pouce indu à un régime. Même si certains analystes venaient à minimiser le document comme n’ayant aucune portée sur le processus électoral en cours, la vérité est que dans l’immédiat, il prête des airs de respectabilité aux candidats qui, dans leur totalité, ne diffèrent pas tant de celui qui représente le CNDD-FDD. En effet, même s’ils ne le reconnaissent pas officiellement dans leur campagne, tous doivent tout à l’organisation qu’ils font semblant de défier. Ce qui confirme pour la nième fois qu’on est à la veille d’une compétition qui n’en est pas une. (BINFO)
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[1] http://www.burundi-information.net/des-burundais-de-la-diaspora-decus-par-le-regime-cndd-fdd-ecrivent-a-pierre-nkurunziza.html
[2] http://www.burundi-information.net/burundi-diplomatie-aux-origines-du-consulat-d-australie.html